C O M M U N I T A S - Q U É B E C

Caractéristiques d'un groupe en communauté

 

Bien que le développement de la vraie communauté implique perpétuellement un effort à recommencer ou à continuer, lorsque l’état de communauté est atteint on note certains comportements de groupe très différents de ceux existant dans les groupes qui ne sont pas en communauté. Certains d’entre nous ont fait cette expérience sans même le réaliser; ainsi il me vient à l’esprit quelques rares fois où je percevais quelque chose de mystérieux, comme si un esprit soufflait sur mon groupe d’amis (avec le soupçon que la consommation de certaines substances à l’occasion pouvait avoir eu un certain effet…) Le sentiment prédominant dans ces cas était celui d’être tous unis, tous pour un et un pour tous, au-delà de la camaraderie. Ce qui ne se disait pas n’avait pas besoin d’être dit; le silence complétait les paroles; les présences étaient perçues comme aussi réelles que la force des mots; et les phrases nous parlaient de la vérité de chacun plutôt que d’une intellectualisation.

Une communauté est un état d’esprit 1. Quand un groupe entre en communauté, on sent un changement dramatique dans l’esprit du groupe 2. On parle d’un mouvement, d’une mouvance vers l’esprit de communauté; cette mouvance provient du vide intérieure recherché, c'est-à-dire le relâchement des barrières de l’ego, le profond et mutuel respect rendu possible par ce relâchement, l’acceptation des différences et de l’originalité, et le sentiment que même dans la diversité, nous pouvons être un et un seul en groupe pour vivre en paix et en harmonie.

Cette perception d’esprit de communauté se ressent comme une paix, une paix qui baigne le groupe quand ce dernier est entré en communauté. Le groupe est complètement tranquille. Chacun semble s’exprimer harmonieusement, avec douceur, bien que les voix semblent porter bien mieux dans la salle de réunion. Il y a des périodes de silence, mais ce n’est jamais un silence lourd. Au contraire, le silence est bienvenu, apprécié. On se sent tranquille. Rien n’est précipité, rien n’est désordonné. Il n’y a plus de chaos. C’est comme si le bruit avait été remplacé par de la musique. Les gens peuvent écouter et aussi entendre. La paix règne 2.

Un aspect important d’un groupe en communauté est son humilité. L’individualisme robuste prédispose à l’arrogance, alors que l’individualisme adouci de la communauté mène à l’humilité 3.  Cette dernière résulte d’une plus grande tolérance par la transcendance des différences.

Enfin de compte, tout ceci ne diminue pas le fait que ce processus et son résultat reste et sans doute restera toujours un mystère. J’observe, à chaque écoute, ce qui se passe dans le film « The Breakfast Club », émerveillé par les soudaines, bien que brèves, périodes de transcendance et de vide intérieur par lesquelles passe ce groupe d’adolescents, périodes qui les rapprochent par la compréhension et l’acceptation les uns des autres. Et cela bien qu’il n’y ait que différences profondes et réelles entre eux; il n’y a qu’à voir dans les autres moments l’intense chaos qui règne! Ces différences, simples ou sophistiquées, de caractères s’intègrent en fin de compte pour devenir des différences harmonieuses reflétant la vraie humanité et le début d’une profonde amitié. Mais je ne suis toujours pas en veine de pouvoir donner une explication rationnelle de comment cela se produit.

Un groupe en communauté est contemplatif, il s’auto examine, il est conscient de lui-même, il s’interroge constamment 4 : « est ce que nous progressons? »  Cet auto-interrogation est encore plus important dans un groupe de travail; seule cette conscience du groupe lui permet de déceler ses problèmes de fonctionnement interne. Dans le M.E.C., j’ai souvent fait l’expérience de cette conscience alors que nous passons systématiquement par le processus de développer notre communauté avant de passer à la tâche. Je dois constater, malheureusement, que lorsque qu’il est question d’accomplir notre tâche, si je ne fais pas attention je reviens spontanément à mes préoccupations et intentions personnelles, mes convictions, mes peurs et finalement le désir de contrôler. C’est ainsi que je dois être non seulement être conscient de moi-même, mais aussi de mon impact sur le groupe. La communauté est l’état de conscience de l’individu aussi bien que du groupe dans son unicité.

Un groupe en communauté est un groupe auquel il est sécuritaire d’appartenir car personne n’y essaie de guérir, convertir, de changer ou d’influencer les autres. On y accepte les membres tels qu’ils sont 5,  c’est-à-dire avec les différences, avec les problèmes, avec les forces et les défauts de chacun. Un groupe en communauté est donc un lieu sûr pour ses membres, permettant à la vérité et à la vulnérabilité de surgir. Car en réalité, nous sommes tous blessés, tous vulnérables. La vulnérabilité est une perception qui n’est pas à sens unique 6, puisqu’elle requiert que nous montrions nos blessures, mais aussi que nous nous ouvrions aux blessures des autres. Ceci ne peut se produire que dans un climat de tolérance, de respect et d’acceptation, conditions nécessaires, entre autres, pour la communauté. On voit là aussi l’importance du principe fondamental de l’anonymat préconisé par les groupes de support, en commençant par Alcooliques Anonymes (dont la consigne est : « ce qui se dit et s’entend ici, reste ici »)

Il n’y a pas de parti pris dans une réelle communauté 7,  parce que les différences sont transcendées. Une communauté est un groupe de gens qui peuvent se battre harmonieusement ! 7 

Une autre caractéristique essentielle d’une communauté est l’absence totale de centralisation de l’autorité 8.  On parle d’un groupe où tous sont leader, où les décisions sont acquises par consensus ou consentement. Les communautés sont parfois vues comme des groupes sans leader, sans chef 8.

Maintenant que les caractéristiques de la communauté dans le sens de cette monographie ont été précisées, que doit-on faire pour développer cet esprit, pour stimuler cette recherche de communication authentique, de vie meilleure dans la société actuelle? Est-il possible de systématiquement poursuivre le but d’être en communauté et si oui, comment? Le M.E.C. ayant fait de sa mission d’apprendre, d’enseigner et de vivre les principes de communauté, je me suis fié à ses expériences nombreuses d’ateliers commandités par ce dernier pour étayer l’approche face à ce développement, dont Scott Peck s’est fait le pionnier aux États-Unis. Voici donc quelques procédures et indications pour aider à atteindre ce but.

 

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NOTES :

1 - page 73

2 - page 74

3 - page 65

4 - page 66

5 - page 68

6 - page 69

7 - page 71

8 - page 72 

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